Gestion Différenciée

Fauchage et entretien des bords de route

L’objectif prioritaire de l’entretien des bords de routes est la sécurité des usagers. Maintenir la visibilité de la chaussée, des équipements, de la signalisation, garantir la lisibilité de la route, permettre l’arrêt sur le bas-côté,... sont des impératifs incontournables de la gestion des dépendances routières. Le bon fonctionnement technique de ces dépendances est également indispensable : l’évacuation des eaux de pluie, l’implantation des équipements routiers et de panneaux, l’accès riverain...

Ces impératifs de sécurité et de fonctionnalité peuvent cependant être facilement conciliés avec des fonctions écologiques et paysagères : l’importante surface représentée par ces linéaires et leur physiologie de corridor sont des atouts non négligeables pour faire de ces espaces des lieux d’accueil de la biodiversité, à condition que leur gestion soit appropriée.

Le fauchage raisonné et différencié des dépendances vertes routières est tout indiqué pour permettre l’expression du potentiel écologique de ces espaces, tout en garantissant la sécurité et l’optimisation des coûts d’entretien. Il comprend “un ensemble de bonnes pratiques destinées à rationaliser le fauchage en bord de route afin que les enjeux environnementaux et économiques soient pleinement intégrés dans la réalisation des objectifs de maintien de sécurité et de conservation du patrimoine routier.”

Un entretien différencié le long de la route

Le fauchage intensif de l’ensemble du bord de route est une pratique très pénalisante pour la biodiversité, mais également coûteuse pour la collectivité.  Il engendre un couvert herbeux peu fleuri, d’un nombre d’espèces limité, dominé par les graminées. Il empêche aux espèces de fleurir, de fructifier et de disséminer leurs graines. Il favorise donc plutôt des plantes à stolons, à croissance rapide,  et opportunistes, comme les chardons.

En fonction de la zone où l’on se trouve et de son éloigement par rapport à la chaussée de circulation, il est tout à fait possible de différencier l’entretien. En plus de diversifier les milieux en présence, cela permet une optimisation des tâches et donc des coûts.

La bande de sécurité
Elle est immédiatement accolée à la chaussée, et constitue une largeur d’environ 1,50m. Elle doit être absolument coupée de façon régulière. Plus on se trouve près de la chaussée, plus la contrainte de sécurité est forte. On utilise généralement une roto-faucheuse. De même les abords des panneaux doivent être dégagés pour une bonne visibilité de ceux-ci.

La fossé
Il présente une fonction hydraulique prioritaire d’écoulement des eaux. Si l’on favorise son enherbement pour permettre une meilleure filtration des polluants, ainsi qu’une régulation du débit et le maintien des sols, il ne doit pas être envahi de végétation au risque d’être obstrué, et de ne plus pouvoir assurer ses fonctions. Il est donc fauché de façon régulière. Des objectifs de biodiversité peuvent être intégrés à sa gestion, pourvu que l’on les concilie avec ses fonctions pré-citées.

Les talus
Ils sont suffisamment éloignés de la route pour que la hauteur de l’herbe ne constitue pas une gêne pour l’usager. Un entretien minimal est donc préconisé, pour éviter un envahissement par des broussailles. Le talus végétalisé est beaucoup plus stable qu’un talus laissé à nu soumis à l’érosion. En outre, les talus sont propices à la conservation des qualités écologiques et paysagères des dépendances routières, l’impératif de sécurité étant moins fort. Pour les fossés et les talus, on utilise généralement une faucheuse-débroussailleuse à bras articulé, plus coûteuse mais adaptée à toutes les situations.

Des milieux intéressants pour la flore et la faune

Les infrastructures sont facteurs de fragmentation et de coupure des paysages et des milieux naturels. Cependant, leurs abords peuvent jouer le rôle de compensation en étant gérés correctement. Avec une gestion adéquate, ces espaces revêtent un véritable intérêt écologique, notamment en matière de corridor. Ceci est encore plus vrai dans les milieux agricoles où la biodiversité a été chassée par les remembrements, la suppression des haies, l’emploi intensif des produits chimiques et la mécanisation. Les espèces trouvent alors souvent refuge sur les dépendances routières. De nombreuses études constatent la présence d’espèces rares et protégées sur ces espaces. Dans certains territoires, on ne trouve plus ces espèces que sur les dépendances routières ! Les bords de route sont donc des habitats naturels  qu’il faut préserver et développer. Les services rendus à l’homme par la biodiversité locale ne sont plus à démontrer : stabilisation des populations d’insectes ravageurs, maintien de la fertilité et de la qualité des sols, limitation des pollution en provenance de la route...

Une attention particulière doit être pratiquée au niveau des plantes invasives qui apprécient les sols perturbés et se développent donc facilement en bord de route. Un inventaire des zones contaminées doit permettre par la suite de prendre des mesures appropriées de traitement.

Fauchez raisonné !

L’idéal est toujours de prendre en compte l’entretien dès le moment de la conception d’un projet (infrastructures neuves ou réhabilitation). Les services chargés de l’entretien devraient être associés aux réflexions en amont des projets, afin de minimier et de faciliter les futures charges d’entretien, tout en s’assurant de la cohérence des interventions avec des enjeux environnementaux.

Par exemple, privilégier un revêtement minéral au pied des glissières et des panneaux pour limiter le fauchage sous ces équipements, prévoir des emprises en fonction du passage des engins d’entretien, choisir des essences végétales adaptées aux conditions, etc...

Dans l’objectif de limiter l’usage de produits phytosanitaires, on privilégiera par exemple le paillage ou le revêtement minéral limitant la pousse de l’herbe sur les endroits où elle est indésirable. On évitera aussi de planter dans les endroits difficiles d’accès, et on préférera les solutions mécaniques et les techniques aternatives au désherbage chimique.

Il est essentiel de bien connaître son patrimoine routier, car la politique de fauchage sera fonction du milieu considéré et de ses contraintes propres. En fonction des contraintes de sécurité, de la réglementation, de la présence d’espaces naturels sensibles ou à fort enjeu écologique, de la présence d’espèces invasives, ... la stratégie sera différente et adaptée.

En fonction de ces informations, puis des objectifs de gestion fixés, un plan d’intervention est établi :  zones à faucher, calendrier de fauchage, niveaux de service à assurer, moyens matériels et humains...

La hauteur de coupe est un facteur déterminant sur les résultats écologiques du fauchage raisonné.  En comparaison, une hauteur de fauche entre 8 et 15 cm, favorise la biodiversité, limite les adventices, réduit l’érosion des sols et régule l’écoulement des pluies, limite l’usure des outils, modère la consommation de carburant des engins par une mobilisation de puissance moindre. A contrario, une fauche en deça de 8 cm, détruit les biotopes, favorise l’envahissement par des espèces indésirables et opportunistes, augmente la vitesse de repousse des végétaux donc nécessite d’intervenir plus fréquemment, induit un ruissellement plus important à cause d’un sol plus compacté et érodé, augmente les risques de projections de débris et d’usure des outils, augmente la consommation de carburant.

Les périodes et fréquences de fauche sont également déterminantes. Il vaut mieux faucher au moment de la formation des épis, ainsi l’herbe repousse moins vite,  et l’épi ne se reforme pas dans la saison. Faucher trop tôt ne permet donc pas de limiter la repousse, au contraire, elle la stimule ! En dehors de la bande de sécurité, où le fauchage sera plus régulier au regard des impératifs de sécurité, les autres zones seront donc fauchées tardivement.

Communiquez

Il est utile de réaliser une campagne d’information destinée à expliquer l’intérêt du fauchage raisonné. L’évolution d’un traitement de la végétation en coupe rase à une fauche haute peut être perçue comme un travail de moindre qualité. L’adhésion de l’ensemble des acteurs de l’entretien routier est donc essentielle, et pour cela, ils doivent avoir compris que le fauchage tardif permet toujours d’assurer la sécurité mais, qu’en plus, il permet l’expression d’une diversité d’habitats, de végétaux et d’animaux, dans des conditions économiques avantageuses.

Sources :
Sétra, note d'information, Fauchez mieux, le fauchage raisonné, 2009
Fauchage et entretien des bords de route, joindre l'utile au durable, Horticulture et Paysage, fév 2010, p. 48-49